Puisque nous sommes dans le même pays que Jana après avoir voyagé séparément pendant 10 mois, un petit voyage en commun s’impose. Nous avons bien envie de faire un tour dans le Nord du Vietnam, mais où? Nous entendons des échos de la baie d’Ha Long et de Sapa, deux énormes trous à touristes qui en plus détériorent la nature en polluant par la masse de visiteurs et la mauvaise gestion de ce commerce… nous ne sommes donc pas très motivés et sommes heureux lorsque Jana nous propose d’aller visiter la région de Ha Giang, tout au Nord du Vietnam, entre vallées et montagnes à pic.

Nous prenons donc le train de Danang à Hanoï  (15 h de train) et passons une journée dans la capitale. Après Saïgon, nous avions peur de nous retrouver dans la pollution, le bruit et la grande ville. Pourtant, dès notre arrivée, nous découvrons une ville aux allures romantique, avec des arbres dans les rues, des lacs un peu partout, des maisons à l’ancienne dans des couleurs ocres, des petits cafés locaux, accueillants et soignés, cachés dans des recoins de ruelles. Jana nous emmène dans des endroits conseillés par ses amis, nous ne sommes pas déçus! Nous goûtons même une spécialité d’ici, un café à l’oeuf !

Le lendemain, nous reprenons le bus pour Ha Giang, à 7h d’ici. Nous nous retrouvons dans des sortes de sièges couchettes assez confortables mais qui ne nous permettent pas de voir grand chose à la route et qui donnent donc un peu mal au ventre dès que nous entrons dans les routes sinueuses. Les Vietnamiens, si habitués aux scooters, ne manquent pas d’avoir la nausée et quand un s’y met, cela fait effet domino!

Nous arrivons donc tard le soir à Ha Giang et découvrons le lendemain matin une ville au pied de montagnes toutes vertes qui nous appellent de par leur aspect si pentu. Nous louons des scooters semi automatique, et c’est parti pour une boucle dans les montagnes de 350km, que nous ferons en 4 jours. Nous montons d’abord beaucoup et sommes surpris par la pluie; nous n’avions pas prévu que nous pourrions avoir froid au Vietnam!! Nous sommes donc contents d’avoir nos veste de pluie mais grelottons un peu dans nos habits mouillés. Heureusement, nous trouvons un bon chocolat chaud en haut d’un magnifique point de vue.

À partir de là, les paysages magnifiques et incroyables s’enchaînent sans que nous ayons le temps de nous remettre de nos émotions d’une vallée à l’autre. Tantôt nous sommes vers des montagnes à pic, tantôt nous plongeons dans le décors vert d’une vallée pleine de maïs où serpente une rivière.

Nous n’allons pas vite du tout et parcourir 70 à 100 km par jour nous prend la journée et nous fatigue en fait passablement. Mais nous relativisons vite lorsque nous faisons la rencontre des populations locales. Ce sont des minorités qui ont leur propre langue et traditions. Les femmes sont habillées avec des jupes très colorées et portent leur bébé sur le dos à l’aide d’un tissu spécial. Quand elles n’ont pas d’enfant dans le dos, c’est une hotte tressée à la main rempli d’herbes ou autres denrées qu’elles sont allés ramasser dans la montagne.

Nous croisons également des enfants très jeunes qui gardent les buffles ou les chèvres. Ils les mènent sur les routes ou dans les champs et passent la journée avec eux. Parfois, ils prennent leur petit frère ou sœur de 3 ans avec eux.

D’autres fois, lorsqu’ils ne sont pas avec les animaux, les enfants portent aussi des hottes et ramassent des herbes. Ils peuvent parcourir des distance à pied qui nous sidère. Nous en croisons au milieu de nulle part, sans route ou maison à des km aux alentours, qui marchent et remontent la montagne.

Les hommes quant à eux sont habillés en noir avec un berret, noir lui aussi. Ils travaillent tout aussi dur que les femmes. Le mode de vie de ces populations nous impressionne et nous laisse très admiratif de leur simplicité et volonté. Parfois, nous croisons une petite mamie qui portent de grosses charges sur son dos et qui se dirige on ne sait où, mais loin. Nous sommes alors un peu honteux de la dépasser tranquillement avec notre scooter qui fait du bruit et qui pollue; nous sommes juste là pour visiter, ce n’est même pas comme si nous avions quelque chose à faire là où nous allons. Pourtant, les gens sont toujours souriants, les enfants cherchent le contact et n’ont pas l’air de se sentir mal à leur place.

Le maïs et le riz sont les principales cultures ici. Nous nous demandons comment ils arrivent à aller planter leur maïs sur des pentes aussi raides mais nous en voyons partout. Quand au riz, les plantations qu’ils ont aménagées dans les montagnes se marient si bien avec la nature que chaque nouveau paysage est un véritable tableau artistique. Nous n’avons jamais vu en Europe des champs d’agriculture qui respectaient autant la courbe du paysage et la beauté de la nature.

Nous dormons dans des petites auberges ou hôtels et faisons la rencontre d’autres voyageurs qui ont eu la même idée que nous. Ha Giang a beau être la région la moins touristique du Vietnam, il y a en quand même un paquet! Nous allons à une jolie cascade dans une des vallée pour profiter de l’eau fraîche. Soudain, une dizaine d’enfants du coin arrivent en courant et criant. Ils enlèvent leurs habits comme des tornades et se jettent dans l’eau. Les voilà qui grimpent avec assurance et agilité sur la roche glissante et vaseuse du bord de la cascade, là où un instant plus tôt nous nous tenions prudemment pour ne pas glisser! Ils sautent depuis tout en haut, sautent encore, nagent, rient et jouent. Ce sont des véritables petits gardiens de la cascade, nous sommes tout émerveillés de voir comme ils se fondent et s’adaptent à cet environnement qui est le leur.

Le 4ème jour, une route difficile et bien cabossée nous fait nous réjouir de rentrer. Sur la route, nous repassons par notre endroit favori pour boire un chocolat chaud, et nous voici déjà à Ha Giang! Nous reprenons le bus le lendemain et arrivons dans la chaleur intense d’Hanoï dans l’après-midi.

Il nous reste une journée pour profiter des cafés de cette ville et de faire quelques petites visite très courtes, pour ne pas fondre, entre deux jus de fruit! Le soir venu, le train nous accueille avec ses couchettes et nous partons direction Hué. 4 jours de voyage en transport pour aller dans cette magnifique région. Un peu long mais cela en valait la peine!

Le lendemain nous sommes bien fatigués car nous n’avons pas fermé l’oeil dans le train. L’énergie revient pour le soir car Alice et Jana ont préparé un petit concert pour les Bambous Paisibles. Un très bon repas nous attend là-bas en l’honneur du départ de Jana, et une bonne nuit de sommeil en perspective, avant de rentrer sur Danang, préparer nos affaires pour la prochaine destination, le Japon!

Chocs, questionnements, anecdotes…:

• En arrivant dans le village de Méo Vac, dans la région de Ha Giang, nous sommes surpris de voir pour la deuxième fois une sorte de tour de radio avec plusieurs hauts parleurs accrochés dessus. Nous entendons un discours vietnamien, un homme et une femme qui parlent sans arrêt, entrecoupés parfois d’une musique. Nous demandons ce que c’est et on nous répond que c’est la radio du gouvernement et qu’elle marche trois fois par jour. Elle relate les nouvelles, les rapports, etc. Même si nous ne comprenons rien à ce que dit la radio et que nous ne comprenons pas tout ce que veut nous dire notre interlocuteur qui ne parle pas très bien anglais, nous sommes choqués de comprendre que les habitants ont l’obligation de vivre avec cette radio dans les oreilles tous les jours; cela nous fait plutôt penser à de la propagande et nous avons même l’impression de nous retrouver dans le livre 1984! Apparemment, ces radios se retrouvent dans les village dans tout le Vietnam.
• Des panneaux sur les maisons avec une jolie Indienne qui tient 2 épis de maïs nous intriguent. Jana regarde sur internet et comprend qu’une compagnie indienne vendant des graines OGM a réussi à pénétrer le commerce des graines ici. Le gouvernement Vietnamien a apparemment autorisé la culture d’OGM en 2015 et a même accueilli les entreprises en les gratifiant d’être des protecteurs de la nature et de son bon équilibre. Nous sommes un peu affolés de constater que ces graines sont arrivées dans cette région si reculée où les gens cultivent le maïs depuis si longtemps, avec des variétés qui sont probablement très adaptées à ces sols. De plus, nous sommes outrés que le gouvernement puisse faire fièrement venir ces graines d’Inde sous la gloire de la révolution verte, quand on sait que tant de paysans se sont suicidés en Inde, ne parvenant plus à payer les graines avec les années, et leur sol se détériorant de plus en plus en raison de tous les pesticides qu’ils devaient y verser… sans compter combien le Vietnam a souffert de l’agent orange pendant la guerre et encore aujourd’hui et sûrement pour plusieurs génération, fabriqué par Monsanto qu’ils ornent aujourd’hui du titre honorifique de protecteur de la nature…
• Nous nous arrêtons une fois dans un petit village pour prendre de l’essence. Une vieille femme qui porte un petit enfant vient vers Mehdi et lui soulève sa manche. Elle montre en riant à l’enfant les poils sur l’avant bras de Mehdi. Cela lui semble très bizarre. Elle soulève la manche d’Alice et semble soulagée de voir qu’il n’y a pas de poils sur ces avant-bras là! Mehdi ouvre un peu sa veste et elle voit ses poils de torse: elle fait un bon en arrière et ne peut cacher son étonnement! Nous éclatons tous de rire. Les poils sont vraiment une denrée rare ici.
• Nous voyons souvent une ribambelles d’enfants autour des femmes dans la région d’Ha Giang. Nous nous demandons quel accès à la contraception ces familles ont et comment cela est perçu par leur culture.
• Depuis notre arrivée à Hanoï et jusqu’au village le plus profond de Ha Giang, nous voyons des grandes pipes en bois en forme de didgeridoo. Nous nous demandons si c’est de l’opium que les hommes fument dans ces pipes. Une recherche sur internet nous apprend que ce serait du tabac qu’ils fument, mais à voir leur état parfois après avoir fumé, nous doutons que ce soit toujours et seulement du tabac.